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Mamadi Doumbouya en Côte d’Ivoire : un signal de rupture avec l’AES ?

Alors que les tensions s’intensifient entre l’AES et la Côte d’Ivoire, le général Mamadi Doumbouya crée la surprise en se rendant à Abidjan. Derrière cette visite officielle aux allures fraternelles, se cache un possible repositionnement stratégique de la Guinée. Le début d’une rupture silencieuse avec le bloc sahélien ?

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Abidjan, 17 juin 2025 – Le président de la Transition guinéenne, le général Mamadi Doumbouya, effectue ce mardi une visite officielle en République de Côte d’Ivoire. Officiellement présentée comme un déplacement visant à renforcer les liens de coopération entre deux nations africaines souveraines, cette visite soulève cependant de nombreuses interrogations, tant elle intervient dans un contexte de fortes tensions entre l’Alliance des États du Sahel (AES) et la Côte d’Ivoire.


Une visite sous le sceau du pragmatisme diplomatique

Dans un communiqué publié par la Direction du Protocole d’État guinéen, la visite est décrite comme étant placée « sous le sceau de l’unité, de la paix et du panafricanisme en action ». Pourtant, au-delà du discours officiel, de nombreux observateurs y voient un réalignement diplomatique progressif de Conakry, à rebours de l’orientation idéologique de l’AES.

Alors que le général Doumbouya avait, dans un premier temps, affiché une proximité idéologique avec les régimes militaires du Mali, du Burkina Faso et du Niger, sa diplomatie récente semble prendre un autre tournant. Son déplacement à Abidjan, capitale économique d’un pays considéré comme l’un des principaux opposants à l’AES, ne peut être interprété comme anodin.


Doumbouya s’éloigne-t-il de l’AES ?

Le contexte politique régional est marqué par une rupture profonde entre l’AES et les institutions ouest-africaines classiques comme la CEDEAO, avec lesquelles la Côte d’Ivoire reste alignée. Alassane Ouattara, président ivoirien, est perçu par Bamako, Ouagadougou et Niamey comme un allié stratégique de la France et un opposant aux dynamiques souverainistes en cours dans le Sahel.

Dans ce climat de méfiance, le choix de Mamadi Doumbouya d’effectuer une visite officielle à Abidjan peut être interprété comme une volonté de marquer sa différence avec les positions de ses homologues de l’AES. La Guinée, qui n’est pas membre de cette alliance militaire et politique, pourrait chercher à garder une posture d’équilibre, voire à se repositionner diplomatiquement en se rapprochant des États encore liés aux mécanismes traditionnels de coopération régionale et internationale.


Une rupture idéologique discrète mais stratégique

Si le général Doumbouya a longtemps été considéré comme un allié tacite du bloc sahélien en raison de ses discours souverainistes et panafricanistes, plusieurs signaux récents montrent un glissement stratégique. Cette visite à Abidjan pourrait donc être perçue comme un message de distanciation à l’égard de l’AES, dont les choix politiques radicaux (rupture avec la France, création d’une confédération, tensions avec la CEDEAO) semblent ne plus faire consensus à Conakry.

Certains diplomates africains évoquent même une volonté du président guinéen de ne pas se laisser entraîner dans une dynamique de confrontation, préférant miser sur un multilatéralisme pragmatique et des alliances diversifiées.


Conclusion : entre repositionnement diplomatique et calcul politique

La visite du général Mamadi Doumbouya en Côte d’Ivoire, au-delà des formules de fraternité africaine, reflète une reconfiguration discrète mais significative de la diplomatie guinéenne. En tendant la main à un régime farouchement opposé à l’AES, le président guinéen envoie un signal clair : celui d’un dirigeant qui entend conserver sa marge de manœuvre et ne pas s’enfermer dans une logique de blocs idéologiques.

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