Présidentielle 2025 : Pourquoi Alassane Ouattara annonce sa candidature maintenant ? Une stratégie pour détourner l’attention ?
L’annonce soudaine de la candidature du président Alassane Ouattara, ce 29 juillet 2025, intervient dans un climat politique tendu, marqué par le décès controversé de l’activiste burkinabè Alino Faso en détention à Abidjan. Pour plusieurs observateurs, le timing de cette déclaration n’est pas anodin. Faut-il y voir une tentative de reprise de contrôle de la communication politique face à une affaire aux implications diplomatiques grandissantes ?

Un calendrier qui interroge
C’est dans un moment particulièrement sensible que le chef de l’État ivoirien a choisi de s’exprimer sur la RTI 1. En affirmant vouloir briguer un nouveau mandat « dédié à la transmission générationnelle », Alassane Ouattara relance le débat politique interne… mais il le fait alors que l’attention de la presse régionale et internationale était principalement tournée vers une autre affaire : la mort d’Alain Christophe Traoré, dit Alino Faso, militant panafricaniste burkinabè.
Officiellement, le président évoque des enjeux économiques et sécuritaires pour justifier sa décision. Mais dans les coulisses, des voix s’élèvent pour souligner que cette annonce intervient quatre jours seulement après la confirmation de la mort en détention de l’activiste, et au moment où les autorités burkinabè exigent le rapatriement de son corps.
L’affaire Alino Faso : un dossier qui embarrasse
Depuis plusieurs mois, le nom d’Alino Faso était devenu emblématique dans les cercles panafricanistes. Son arrestation en janvier 2025 à Abidjan, suivie de six mois de détention sans procès, avait déjà suscité des interrogations. Sa mort, qualifiée de « pendaison » par le procureur ivoirien, a provoqué une onde de choc au Burkina Faso, où les autorités parlent ouvertement d’un « assassinat politique ».
Face à cette tension croissante, la réponse officielle ivoirienne s’est faite discrète, tandis que plusieurs ONG et mouvements de la société civile appellent à une enquête indépendante.
Dans ce contexte, l’annonce présidentielle agit comme un rideau médiatique : elle change la nature du débat public, déplace les projecteurs, et repositionne le chef de l’État sur une thématique plus institutionnelle — celle de la continuité et de la relève.
Une stratégie de communication bien calculée ?
Ce n’est pas la première fois qu’un événement politique majeur vient supplanter un scandale en gestation. En politique, maîtriser l’agenda médiatique est un levier de pouvoir. En déclarant sa candidature maintenant, le président Ouattara reprend l’initiative, détourne l’attention des médias nationaux et tente de réimposer son récit.
La notion de « transmission générationnelle » évoquée dans son discours a aussi le mérite de rassurer une partie de l’opinion : elle suggère qu’il s’agit d’un mandat de transition douce, non de perpétuation.
Mais en occultant l’affaire Alino Faso, cette stratégie pourrait aussi avoir l’effet inverse : alimenter la suspicion, nourrir le ressentiment, et fragiliser les relations avec un voisin clé comme le Burkina Faso, qui a déjà exprimé son mécontentement de manière diplomatique.
Des tensions diplomatiques à surveiller
Depuis quelques mois, les relations entre Abidjan et Ouagadougou sont devenues plus froides. La détention d’Alino Faso, figure appréciée dans les milieux patriotiques burkinabè, avait déjà envenimé le climat. Sa mort, dans des conditions non élucidées, ouvre la voie à une crise diplomatique latente.
L’annonce de candidature, en détournant le débat, ne règle pas ce contentieux. Au contraire, certains analystes estiment qu’elle pourrait être perçue comme un signe de désinvolture ou de mépris à l’égard des préoccupations légitimes exprimées par le peuple et les autorités burkinabè.
Enfin : détourner l’attention ou structurer la succession ?
L’annonce de la candidature du président Ouattara à la présidentielle de 2025 ne saurait être analysée sans prendre en compte le contexte immédiat dans lequel elle s’inscrit. Si elle répond sans doute à des considérations internes – sécuritaires, économiques, institutionnelles – elle intervient surtout à un moment critique, où la Côte d’Ivoire est interpellée sur une affaire aux résonances internationales.
Le temps dira si ce choix stratégique aura permis d’apaiser les tensions ou s’il aura aggravé une fracture déjà perceptible entre Abidjan et Ouagadougou. En attendant, une chose est certaine : la question d’Alino Faso ne disparaîtra pas aussi facilement du débat public.