Franc CFA : Outil de domination ou de stabilité monétaire ?
La sortie du franc CFA ne saurait se réduire à une question technique ou juridique.

Franc CFA : Outil de domination ou de stabilité monétaire ?
Créé en 1945, le franc CFA (alors Franc des Colonies Françaises d’Afrique) apparaît d’abord comme une nécessité logistique dans l’empire français

Mais derrière cette naissance technique, se cache une philosophie implicite : celle d’un monde structuré par une hiérarchie entre civilisations. Le système monétaire devient alors un outil d’ordre, une extension du pouvoir colonial, dont l’objectif n’est pas uniquement économique, mais aussi civilisationnel, maintenir les anciennes colonies dans un état de dépendance fonctionnelle.
Cette genèse pose une question fondamentale : peut-on véritablement décoloniser sans rompre avec les instruments de la colonisation ? Ou plus radicalement : le franc CFA peut-il être autre chose qu’un vestige de l’aliénation politique ?
Les défenseurs du CFA invoquent souvent la stabilité : inflation maîtrisée, convertibilité garantie avec l’euro, ancrage dans une zone monétaire solide. Il est vrai que dans un continent marqué par des crises monétaires chroniques, ces éléments séduisent. Mais cette stabilité, à quel prix ?

Elle suppose en réalité une dépossession : les réserves des pays utilisateurs sont en partie logées au Trésor français ; les politiques monétaires sont contraintes par des décisions exogènes. La souveraineté devient formelle, jamais substantielle. Est-il acceptable, philosophiquement, qu’un peuple abdique sa capacité à penser sa propre monnaie au nom d’une promesse de stabilité ? N’est-ce pas là le piège du paternalisme monétaire : garantir la paix économique au prix du silence politique ?
La sortie du franc CFA ne saurait se réduire à une question technique ou juridique.
C’est d’abord une émancipation symbolique, un acte qui affirme que l’Afrique a le droit de penser, de créer, de choisir sa propre trajectoire économique.
