La CPI à Conakry après la grâce de Moussa Dadis Camara, une justice contestée
Deux mois après la grâce présidentielle de Moussa Dadis Camara, condamné pour crimes contre l’humanité dans le cadre du massacre du 28 septembre 2009, une mission de la Cour pénale internationale (CPI) est à Conakry. Alors que les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) annoncent leur retrait de la CPI, cette visite soulève de nouvelles interrogations sur l’efficacité de la justice internationale et l’avenir de la Guinée dans cette institution.

La CPI de retour à Conakry
Une délégation de la CPI séjourne actuellement à Conakry pour accompagner les autorités dans l’organisation du procès lié au massacre du 28 septembre 2009, qui a fait plus de 150 morts et une centaine de femmes violées sous le régime du capitaine Moussa Dadis Camara.
Depuis 2009, la CPI a mené plusieurs missions d’évaluation à Conakry afin de vérifier l’engagement des autorités à rendre justice aux victimes. En 2022, le procureur Karim Khan s’était déplacé à Conakry et avait salué l’ouverture du procès, signant un mémorandum d’accord avec le président de transition Mamadi Doumbouya.
La grâce présidentielle fragilise le processus judiciaire
Moins d’un an après sa condamnation pour crimes contre l’humanité, Moussa Dadis Camara a bénéficié d’une grâce présidentielle pour raisons de santé, accordée par le général Mamadi Doumbouya. Cette décision fragilise le mémorandum avec la CPI, notamment son article 4, qui permet à la Cour de se saisir du dossier si une mesure « susceptible de nuire fortement à l’avancement de la justice » est constatée.
Pour Alseny Sall, chargé de communication de l’OGDH :
« La grâce est intervenue alors que la procédure n’avait pas atteint une phase définitive. Cela viole les principes fondamentaux du procès équitable et affaiblit la confiance des victimes dans la justice. »
Les critiques africaines envers la CPI
Cette situation s’inscrit dans un contexte plus large de critiques africaines envers la CPI. De nombreux États estiment que la Cour cible principalement des dirigeants africains, tout en ignorant les crimes commis ailleurs. Cette perception a conduit les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) à décider récemment de quitter la CPI.
Dans ce cadre, certains observateurs suggèrent que la Guinée devrait elle aussi envisager de se retirer de la CPI, afin de reprendre le contrôle de ses procédures judiciaires et garantir une justice véritablement adaptée aux victimes guinéennes.
Les victimes toujours en attente
L’OGDH dénonce également un choix sélectif dans l’indemnisation des victimes : seules 334 sur près de 500 parties civiles au procès ont été concernées. Cette sélection accentue le sentiment d’injustice et souligne la nécessité d’un engagement plus sincère des autorités et de la communauté internationale.
Enfin
La mission actuelle de la CPI à Conakry intervient dans un contexte sensible et controversé. La grâce présidentielle accordée à Moussa Dadis Camara, combinée aux critiques africaines envers la CPI et au départ des pays de l’AES, pose de sérieuses questions sur l’efficacité et l’impartialité de la justice internationale. Pour la Guinée, cette situation pourrait justifier un retrait de la CPI afin de garantir une justice souveraine et équitable pour toutes les victimes.
