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Tchad : Inspiré par Traoré, Deby Jr. veut révolutionner le Tchad… mais ira-t-il assez loin ?

En multipliant les descentes surprises dans les rues de N’Djamena, Mahamat Idriss Déby Itno veut incarner une nouvelle manière de gouverner, plus proche du peuple et du terrain. Inspiré par le modèle burkinabè d’Ibrahim Traoré, le président tchadien bouscule les codes du pouvoir. Mais ces gestes suffiront-ils à changer un système rongé par la corruption et l’inaction ? Le Tchad est à un tournant : il ne s’agit plus de montrer, mais d’agir.

Il IMITE IBRAHIM TRAORÉ et ça fait MAL le président Deby FRAPPE FORT au Tchad

Une inspiration burkinabè assumée

C’est au Burkina Faso, cinq mois plus tôt, que le président tchadien posait un geste hautement symbolique : il devenait le premier chef d’État étranger à visiter le Mémorial Thomas Sankara. En rendant hommage à l’icône panafricaine de l’intégrité et de la justice sociale, Déby Jr. envoyait déjà un signal fort : l’Afrique a besoin de leaders d’action, pas de bureaucrates sourds.


Des descentes spectaculaires dans les rues de N’Djamena

À plusieurs reprises, le président a surpris tout le monde. Le 3 juin 2025, puis le 16 juin, il quitte son bureau sans escorte tapageuse. Il sillonne les quartiers inondés, les zones mal drainées, les services publics défaillants. Il mesure lui-même la profondeur des caniveaux mal construits, échange directement avec les citoyens, et prend note des dysfonctionnements flagrants.

Dans un pays habitué à une présidence distante, cette posture impressionne. Mais suffit-elle ? Non.


Un constat brutal : les vieilles pratiques résistent

À la Caisse nationale des retraités civils du Tchad, la scène est choquante : files d’attente interminables, retraités à bout de souffle, arnaques, pensions impayées depuis des mois. Le président découvre une situation catastrophique, pourtant maquillée dans les rapports officiels. Il ordonne un audit immédiat. C’est un bon début, mais les promesses doivent être suivies de réformes concrètes.


Une impulsion présidentielle… mais une inertie systémique

Le président peut impulser, montrer l’exemple, mais il ne peut pas tout faire seul. Le problème du Tchad – comme dans beaucoup d’États africains – est structurel. La corruption est enracinée, la culture de l’impunité est tenace, et les relais intermédiaires de l’État (ministères, gouvernorats, mairies, chefs de service) freinent souvent les changements de fond.

Sans un nettoyage radical de l’administration, sans sanctions exemplaires, les descentes présidentielles resteront des spectacles sans lendemain.


Il faut aller plus loin : changer le système, pas seulement l’image

Ces descentes, bien que courageuses, ne doivent pas devenir de simples opérations de communication. Le Tchad a besoin de réformes structurelles :

  • Digitalisation des services publics pour réduire la corruption.
  • Réforme des retraites avec traçabilité des paiements.
  • Délai légal de traitement des pensions, contrôlé par une autorité indépendante.
  • Création d’une brigade anticorruption citoyenne.
  • Audits réguliers et publication publique des résultats…

Le président a ouvert une brèche. Il faut maintenant forcer le passage.


Un modèle panafricain en gestation, mais fragile

L’exemplarité du président, inspirée par le capitaine Ibrahim Traoré, est saluée dans de nombreux cercles panafricanistes. Ces deux jeunes leaders incarnent une rupture. Mais pour durer, cette nouvelle gouvernance doit s’appuyer sur :

  • Des institutions fortes et crédibles
  • Des mécanismes de redevabilité transparents
  • Une mobilisation citoyenne constante

Le changement ne doit pas dépendre du bon vouloir d’un homme, mais de l’instauration de règles claires, durables, applicables même après lui.


Enfin : descendre du piédestal ne suffit pas, il faut transformer la maison

Le président Mahamat Idriss Déby Itno a montré du courage. Il a pris des risques, brisé le protocole, touché du doigt la souffrance du peuple. C’est un bon signal. Mais le peuple n’a plus besoin de signaux, il a besoin de résultats.

L’administration doit être purgée, réformée, redressée. Les promesses doivent devenir des actes tangibles, mesurables, irréversibles.

Le Tchad ne peut pas se contenter de descentes surprises. Il faut changer la culture politique, la mentalité administrative, et rétablir l’exigence de service public.

Sinon, ces descentes spectaculaires finiront noyées dans l’indifférence générale, comme tant d’élans trahis par l’inaction.

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